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Clément CAMBOURNAC

Journal et lettres de Clément CAMBOURNAC"poilu" de la Grande Guerre

Y penser toujours, n'en parler jamais
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Mes parents me croient à plusieurs kilomètres des lignes, à l'abri du canon

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16 mars 1915

Mon bien cher Jean, 

Voilà bien longtemps que je n'ai pas eu le plaisir de te lire. Je serais très heureux si ce retard était dû simplement à un peu de flemme que je te pardonnerais de bon coeur. Mais depuis quelques jours je suis un peu inquiet. J'ai songé qu'on avait besoin d'infirmiers de la marine sur les vaisseaux qui opèrent dans les Dardanelles. Je commence à craindre un peu que tu ne soies plus à Rochefort. Je suis sûr que tu ne voudras pas me laisser dans l'incertitude et que si tu n'es pas parti, j'aurai sous peu une longue lettre . Tu me disais sur ta dernière lettre que tu étais un peu fatigué ;  tout cela me rend un peu inquiet sur ton compte et je serai tout heureux de savoir de quoi il s'agit. A bientôt des détails si tu es toujours à Rochefort, ce que j'espère encore.

obusMa vie est à peu près la même ; nos occupations sont peu absorbantes ; je me promène beaucoup ; je fais de la photo ; j'ai une petite collection assez intéressante ; si cela peut t'être agréable, je t'enverrais dès maintenant quelques épreuves ; ce sont des scènes de guerre prises à petite distance des lignes, certaines aux tranchées de 1ère ligne. J'ai sur moi quelques positifs ; je te les envoie. Je viens de me munir il y a une quinzaine de jours d'un Kodak 7XII extrêmement pratique, bien plus que celui que j'avais avant et j'ai de quoi faire de très belles choses ; c'est avec cet appareil que j'ai fait les photos que je t'envoie.

Notre vie toujours un peu monotone ne manque pas d'intérêt ; entouré de bons copains, placé sous les ordres de chefs très aimables, je serais mal venu à prendre le cafard... Je n'ai guère de goût à t'écrire longuement ne sachant où et quand ma lettre t'arrivera. J'espère que tu voudras me rassurer pleinement au plus tôt.

Je t'embrasse bien affectueusement

Clément

Mes parents me croient à plusieurs kilomètres des lignes, à l'abri du canon. Donc garde toi bien de montrer ces photos à toute personne qui de près ou de loin puisse avoir des relations avec quelque membre de ma famille.

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