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Clément CAMBOURNAC

Journal et lettres de Clément CAMBOURNAC"poilu" de la Grande Guerre

Y penser toujours, n'en parler jamais
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nous avons simplement la sublime mission de nous tourner les pouces

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19 nov.

De service à Tracy ; journée terriblement ennuyeuse ; le soir je vais coucher chez le bon curé de Tracy qui me reçoit assez bien. Pour la 1ère fois depuis Pierrefonds je couche dans un lit ; pour la 1ère fois ou presque aussi je rencontre des civils sympathiques ; dans la journée j’ai cherché en vain un cantonnement potable ; le soir, je suis heureux de trouver ce brave curé. Dans la journée, promenade sur la route d’Attichy ; il fait un froid de loup.

20 nov.

J’assiste pour la 1ère fois depuis longtemps à la messe dans une église, à Tracy-le-Mont. J’ai le bonheur de faire la Sainte Communion. Je rentre à Offémont ; il est question de nous construire une “guitoune” pour remplacer l’ignoble pièce où nous sommes entassés.

21 nov.

De service à Bimont où je passe une très agréable journée en compagnie de mon charmant confrère Vincent. Je dis “agréable” et dans ce cas l’utile n’est guère mélé à l’agréable. Nous sommes “chargés du service médical” ( ! ! !) qui est nul par définition dans les groupes de brancardiers. Comme d’autre part le sergent et les caporaux sont chargés de cette stupide besogne qu’on appelle le “service”, nous avons simplement la sublime mission de nous tourner les pouces. Nous le faisons le plus consciencieusement possible. Nous voulons faire notre devoir jusqu’au bout. Je suis très bien traité chez les tirailleurs et je conserverai un très bon souvenir du sergent Perest, du caporal Le Breton aux multiples aventures et surtout de mon aimable camarade Vincent.

22 nov. dimanche.

routeEn rentrant à Offémont on m’apprend que le service de Bimont est supprimé pour le méd. aux. ce qui n’est pas pour me déplaire. On commence la construction de notre cabane avec l’aide de la section de corvée que le médecin-chef affecte à cet(te) occupation.

23 nov.

De service à Ollencourt ; journée calme, sauf l’après-midi où l’arrivée de quelques marmites cause quelques émotions parmi les brancardiers. Le matin, le sergent entre dans ma chambre peu après mon arrivée et prend des airs de commandement qui me font monter la moutarde au nez ; je saisis l’occasion pour dire ce que je pense à mon état-major (!). Quelques instants après, j’envoie balader le caporal ce qui me remet en bonne humeur. Petit incident avec le sergent. J’offre le vin chaud à ma section, ce qui  me paraît toucher tous ces braves types. L’un d'eux parle déjà du vin d’honneur qu’on m’offrira le jour de la séparation à Perpignan.


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