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Clément CAMBOURNAC

Journal et lettres de Clément CAMBOURNAC"poilu" de la Grande Guerre

Y penser toujours, n'en parler jamais
contexte9 Tracy-le-Mont, à 80 km au nord de Paris, près de Soisson, conserve, au hameau de Bernanval, une maison reconvertie durant la première guerre mondiale en poste de secours. 

c’est ma première “mission” !

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21 oct.

Le soir nous procédons à un exercice d’embarquement qui s’effectue dans de bonnes conditions. On divise infirmiers et tringlos en 2 groupes ; je suis inscrit à la 2è section du 1er groupe, avec Terrier et Pouch aux autres sections, sous les ordres directs du médecin-chef qui a bien voulu nous promettre de ne pas nous séparer, si possible, Pouch et moi.

22 oct.

Nous allons après déjeuner en reconnaissance au Puits, exactement en promenade au Puits d'Orléans. Nous traversons une partie de la forêt de Laigne qui est absolument splendide avec les teintes multiples de son feuillage, ses sentiers à peine dessinés, ses carrefours aux allées multiples. Petit incident amusant au Puits où un aide-major me prend pour un simple soldat ...

Nous allons jusqu’à St Léger ; au retour arrêt entre St Léger et le Puits. Nous passons une 1/2 heure à écouter tirer et éclater nos canons disposés à assez bonne distance. À notre rentrée à Offémont, nous avons le plaisir de lire un communiqué officiel excellent ; échec allemand sur l’Yser.

23 oct.

Temps superbe ; les aéros en profitent ; nous voyons d’abord 2 français, puis vers 10 heures un troisième que les allemands canonnent ; nous voyons l’avion français entouré de petits nuages formés par les obus, qui se rapprochent de plus en plus de lui, puis tout à coup, nous le voyons piquer de la tête ; l’angoisse nous gagne déjà lorsque nous le voyons se redresser brusquement et reprendre son chemin pendant que les boches déroutés par cette feinte envoient leurs obus à 300 mètres de là. Dans la matinée nous allons Pouch et moi visiter la carrière Malvoisine ; nous avons le plaisir de rencontrer notre ancien camarade Le Boulair brancardier régim(entaire).

Le soir le médecin-chef m’invite à déjeuner. Le soir je vais au Bois de St Mard pour reconnaître plusieurs endroits où je dois faire transporter de la chaux le lendemain ; c’est ma première “mission” ! ! On me l’annonce comme devant être dangereuse d’après la topographie des lieux ; aussi suis-je quelque peu ému lorsque l’abbé Mas me recommande à mon départ d’être prudent. Précaution inutile d’ailleurs ; nous arrivons en voiture à Bimont où je recontre le docteur Arnaud et où j’attends une heure le passage du colonel Régnier ; je vais enfin à sa rencontre et je prends tous les renseignements utiles. Retour sans incident. Pendant ce temps on a enterré à l’ambulance un malheureux sous-officier d’artillerie, observateur de son groupe, tué la veille au Bois de St Mard ; la cérémonie a été très émouvante et je trouve mes camarades et nombre de brancardiers fort impressionnés.


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