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Clément CAMBOURNAC

Journal et lettres de Clément CAMBOURNAC"poilu" de la Grande Guerre

Y penser toujours, n'en parler jamais
contexte0

Le soir, malgré moi je suis envahi par une sorte de peur, sans pouvoir réagir

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27 août.
Je fais ma première marche : on va à Toulouges, où on reçoit un accueil enthousiaste. Les gens sont d’une extraordinaire générosité ; délicieuse popote avec l’aide d’une aimable institutrice ; retour très agréable ; entrée sensationnelle à Perpignan.

28 août.
Deuxième marche à Pia.

29 août.
Je vais à la messe à la cathédrale ; on apprend que les Allemands sont à La Féré. Le soir, malgré moi je suis envahi par une sorte de peur, sans pouvoir réagir ; il me semble toujours voir devant moi mon cher Urbain blessé ou tué ; je vais passer à St Mathieu une partie de ma soirée et je prie ardemment pour que les balles soient plutôt pour moi que pour mon frère. Je sors un peu réconforté ; mais je n’oublierai jamais cette soirée épouvantable où mon moral descendit, je l’avoue bien bas.

30 août. - 5 sept.

Rien à signaler.

6 sept. ... 14 sept.

Messe très émouvante à l’hôpital ; puis toujours même vie monotone, coupée par quelques bonnes soirées à la chambrée : Chasse mouvementée au rat ; on saisit et on embouteille l’infortuné quadrupède ; danse du scalp en képi, jugulaire, ceinturon, coupe-choux, à la lueur blafarde d’une bougie ; émouvantes funérailles : grandiose catafalque. Le lendemain soir, conseil de guerre pour juger la conduite du général Sarrat accusé d’avoir fui devant l’ennemi, en l’occurence le minuscule rongeur. Après un réquisitoire de Lugan, deux plaidoiries de Toutes et Dujol, L’accusé est condamné à une peine infamante !!!! Changement à Racine ; départ de Pouch à la Miséricorde.

15 sept.

Au moment de partir en marche on annonce le départ des étudiants à moins de 12 inscriptions. Fiévreux préparatifs et départ avec un (assez) grand enthousiasme.

En même temps je reçois mon affectation à la Miséricorde où j’aurai le plaisir de retrouver Pouch parti 3 jours avant.

Accueil peu chaleureux ; affecté à la salle 4, j’y ai connu d’excellents camarades dont je conserverai le meilleur souvenir sous les ordres de deux caporaux, l’un très chic, l’autre tout à fait crétin.


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